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La vie de Saint-Avertin

 

Crédit photo : Musée Flaubert et d'histoire de la médecine CHU de Rouen

St Avertin, St Livertin, st Everzin… : plusieurs appellations qui, selon les époques et les lieux, se réfèrent à plusieurs personnes ou à une seule…voilà qui peut créer un peu de confusion dans notre compréhension du personnage !

 En effet, sous le nom d’Avertin,  il n’y a pas une,  mais au moins quatre personnes, ayant toutes occupé des fonctions religieuses. Elles ont vécu aux 6ème, 8ème, 12ème  et 14ème siècles.

 De ces pieuses personnes, seules celles du 12ème et du 14ème ont reçu la distinction de saints, et sont restées connues sous le nom de saint Avertin. Aucune biographie des quatre personnages n’est véritablement certaine… Il nous faut donc rester très prudents !

Le Saint qui nous intéresse ici, et qui a fait l’objet du plus de commentaires de la part des hagiographes, est bien celui du 12ème siècle, supposé  avoir été un compagnon de Thomas de Canterbury.

 

Un diacre, compagnon de Thomas Becket ?...pas sûr !

De nombreuses biographies du saint, recopiées parfois d’ouvrage en ouvrage, nous parlent d’un personnage, venu d’Ecosse, appelé “Aberdeen” dans son pays d’origine.

Voici la présentation de notre personnage telle qu’elle apparait le plus couramment chez ses biographes.

Né vers 1120, il aurait quitté son couvent d’Ecosse de l’Ordre de saint Gilbert de Sempringham sur la demande de Thomas Becket, archevêque de Cantorbéry, pour guider celui-ci dans son exil. Henri II Plantagenet, roi d’Angleterre, avait nommé Thomas Becket “Primat du Royaume”, espérant qu’il le seconderait. Mais il avait très vite constaté son profond désaccord et avait été contraint de fuir.

 Parti de Northampton, il s’était réfugié chez son ami proche : Gilbert. Il n’est pas impossible qu’Avertin fut alors amené à accompagner le prélat dans sa fuite, d’abord vers le Kent, puis en France. Il serait alors venu accompagner Thomas au concile de Tours le 10 mai 1163, alors que celui-ci devait expliquer sa position devant l’Assemblée Conciliaire, présidée par le Pape Alexandre III. Le concile terminé, Thomas Becket et Avertin rentrèrent en Angleterre où ils furent confrontés aux célèbres “Constitutions de Clarendon”. Le prélat avait d’abord promis de les observer. Puis il s’était repris et avait refusé d’apposer son sceau au bas de ces constitutions, non conformes, selon lui, à la doctrine de l’Eglise. Ceci marqua le début d’un conflit entre Thomas Becket et le Souverain. L’Archevêque, sous les menaces du roi, fut obligé de fuir, de prendre la route de l’exil le 14 octobre 1164. Il se jeta dans une barque et après seize jours de traversée, il aborda sur une plage de Flandres. Il aurait pu être accompagné entre autres, d’Avertin, qui l’aurait suivi dans les étapes de sa vie errante. Puis, après un certain nombre de péripéties, Avertin serait revenu avec lui en Angleterre.

 Après l'assassinat de Thomas Becket dans sa cathédrale, le 29 décembre 1170, Avertin aurait pris le chemin de la Touraine, dans le calme pays du grand saint Martin de Tours,  et aurait décidé de vivre en ermite dans les bois de Cangé près de Vençay. Sa sainteté n’aurait pu échapper aux pèlerins qui venaient en masse sur la tombe de saint Martin. De partout, on venait le consulter pour des migraines et autres afflictions. Les habitants du village souhaitèrent alors qu’il devint curé de leur paroisse. Il mourut le 5 mai 1180 et reçut sépulture en l’église Saint Pierre. Les pèlerins en foule continuèrent à venir à Vençay après sa disparition, et plus particulièrement le mardi de Pâques et le 5 mai, anniversaire de sa mort. La ville de Vençay prit le nom de Saint Avertin dès la fin du 13 ème siècle.  La fête du saint resta fixée au 5 mai.

Un bémol à cette sympathique histoire de vie : Dom Guy Oury, O.S.B., dans la Contribution à l’étude du culte de saint Avertin, remarque que cette identification à un compagnon de Thomas Becket  se heurte à un obstacle majeur : les compagnons d’exil de Thomas Becket sont aujourd’hui historiquement connus, et aucun ne porte le nom de saint Avertin…

Alors, sans doute faut-il interpréter ce récit de vie comme une simple et belle légende colportée par la piété populaire.

 

Présentons maintenant rapidement les trois autres personnages qui portent le même nom.

 Saint Avertin, c’est aussi :

Un compagnon de St Honnorat (6 ème siècle)

Compagnon de St Honnorat, le bienheureux Livertin, vécut du temps de Totila, roi des Goths. Il serait mort à Troyes vers 528.

Un diacre écossais (8 ème siècle)

Massacré par les Arabes en même temps que son évêque Gratien, vers 732, près de la Celle- saint-Avant, en Touraine, alors qu’il effectuait un pèlerinage vers Rome.

Un prêtre carme avec le bienheureux Roméo (14 ème siècle)

Deux religieux carmes au monastère de Limoges, l'un comme prêtre, l'autre, Roméo, comme frère convers, se rendaient en Terre Sainte quand la peste les fit mourir à Lucques en Toscane vers 1380. On fit de belles funérailles aux pieux pèlerins, on les plaça sur les autels, on leur composa une biographie merveilleuse : ils étaient venus de si loin, pour aller auprès du tombeau du Christ ! L'on ignore pourquoi l'un est saint et l'autre seulement bienheureux. Sa fête est fixée au 25 février.

 

Sources :

- Contribution à l’étude du culte de st Avertin / Dom Guy Oury. Bulletin de la Société archéologique de Touraine. XXXV, 1967 pp 97-119

- Dictionnaire de biographie française / Prevost  et Roman d’Amat. Paris : Letouzey, 1948

- A Forgotten English Saint (article dans The Tablet 31st August 1895) Voir le texte anglais intégral dans les Documents

- Grand livre des saints. Culte et iconographie en Occident / Jacques Baudoin. Nonette : éditions Créer, 2006

- le Martyrologe romain  https://nominis.cef.fr/contenus/saint/6789/Saint-Avertin.html  et : https://nominis.cef.fr/contenus/saint/700/Saint-Avertin-et-le-bienheureux-Romeo.html

- Mélanges d'hagiographie bretonne (Saint Ethbin, Saint Idunet et Saint Dunet, Saint Brévara, Brévalaire, Brandan, Saint Avertin-Saint Everzin) /René Largillière. Brest : Imprimerie de la presse libérale, 1925 Voir le texte intégral dans les Documents

- Œuvres complètes. Tome X. Hagiographie (deuxième partie) / Barbier de Montault.  Poitiers : Imprimerie Blais, Roy et O, 1898 http://www.liberius.net/livres/OEuvres_completes_de_Mgr_X._Barbier_de_Montault_%28tome_10%29_000000162.pdf  Voir dans cet ouvrage les pages 300 à 317 et plus particulièrement le récit biographique pages 308 à 311.

- Saint Avertin / Anthony Roulliet. Tours, 1881 et Bulletin de la Société archéologique de Touraine, 1883 ; pp 303-325 Voir le texte intégral dans les Documents

- Saint Avertin-saint Everzin  / René Largillière. Bulletin diocésain d'histoire et d'Archéologie du diocèse de Quimper et Léon, Brest, Imp. de la Presse libérale, n° 4, juillet-août, 1924, pp. 199-202 

- St Avertin, serviteur de Dieu. D’après la tradition. / Michel Ramette. Chambray-les Tours : Imprimerie de la plage, 1980 

- Supplément aux vies des saints et spécialement aux Petits Bollandistes d’après les documents les plus authentiques et les plus récents. Tome II. 1 mai à fin août / Paul Piolin.  Paris : Bloud et Barral libraires-éditeurs

- Vie des pères, des martyrs et des autres principaux saints tirées des actes originaux, et des monuments les plus authentiques avec des notes historiques et critiques – 10 / Butler Alban. Villefranche-de-Rouergue : chez Pierre Vedeilhie, 1783. https://books.google.fr/books?id=T7dC4wOHWRQC, voir p. 147

- Les Vies des SS. Pères des déserts d’Occident. Avec des figures qui représentent l’austérité de leur vie et leurs principales occupations. Tome 1er. Les vies des saints solitaires d’Occident. Paris, chez Jean Mariette, 1708. chap. : St Honnorat et S Livertin p.185